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1 février 2021

2021 : Faites Le Saut De L’autre Côté

Avec l’arrivée des démocrates aux deux sièges de la Géorgie au Sénat américain, le 5 janvier 2021, les grandes incertitudes politiques de 2020 sont désormais derrière nous. Avec seulement la plus étroite des majorités, au Sénat et une majorité réduite à la Chambre des représentants, on peut s’attendre à ce qu’une administration Biden unifiée fasse pression en faveur d’une augmentation des dépenses fiscales, d’une limitation des augmentations d’impôts et de la charge réglementaire et d’un processus de nomination politique globalement plus fluide. Toutefois, il n’existe pas de mandat, ni de soutien majoritaire probable pour les éléments les plus ambitieux du programme politique progressiste.

 

L’impact économique du résultat des élections sera probablement une plus grande stimulation, compensant certaines hausses d’impôts, afin d’accélérer légèrement la croissance économique (PIB). D’où la récente augmentation des taux obligataires à long terme pour refléter l’accélération de la croissance et les prévisions d’inflation.

 

Le principal moteur de la reprise économique américaine et mondiale attendue dans l’année à venir est, de loin, le déploiement en cours des vaccins contre la COVID-19. Alors que les deux prochains mois seront extrêmement difficiles en termes de cas de COVID-19 et de décès, il s’agira probablement de la dernière vague, car le déploiement des vaccins continuera à prendre de l’ampleur dans les mois à venir, malgré des contretemps à court terme.

 

Le déploiement du vaccin permettra une nouvelle réouverture économique au printemps et en été, et nous nous attendons à une explosion de la demande refoulée alimentée par les ménages dont l’épargne est élevée grâce à des mesures de soutien budgétaire et aux effets de richesse résultant de la vigueur des marchés du logement et des actifs. La croissance sera encore soutenue par la reconstitution des inventaires, les dépenses d’investissement (Capex) et les activités de fusions et acquisitions au fur et à mesure de la reprise.

 

L’année 2020 a connu l’un des pires résultats économiques depuis des décennies, et 2021 sera probablement l’un des plus forts, avec une croissance du PIB qui devrait être bien supérieure à 5 %. Nous pensons qu’une telle croissance, à son tour, entraînera une forte reprise des bénéfices et soutiendra la progression que nous avons observée sur les marchés des actions. La politique monétaire maintiendra les taux d’intérêt à court terme à zéro jusqu’en 2021 et au-delà. Nous maintenons une position surpondérée en actions.

 

PANDÉMIE ET POLITIQUES

 

En termes de prévisions, les perspectives économiques pour 2021 sont l’une des plus claires que nous ayons vues depuis des années. Si des chocs exogènes peuvent toujours se produire, comme l’a montré la COVID-19 en 2020, une prévision dépend des diverses forces endogènes qui façonnent l’économie et le cycle économique, généralement un mélange de forces compensatoires. Fait inhabituel, en 2021, presque tous les facteurs endogènes poussent dans la même direction. Nous nous attendons à ce que, sur le plan économique, et donc sur le plan des bénéfices, 2021 commencera par un démarrage lent qui fera rapidement boule de neige, à l’approche du printemps, et se poursuivra jusqu’en 2022.

 

Depuis le début de la pandémie, l’année dernière, nous avons indiqué que toute prévision doit être fortement dépendante de la trajectoire du virus de la COVID-19 et des réponses politiques déployées par les gouvernements en conséquence, afin de compenser les impacts économiques. L’année dernière, l’ampleur des deux forces était très incertaine et œuvrait dans des directions différentes. Les objectifs politiques visaient à compenser les dommages économiques causés par le virus et à faire le lien entre les économies, les ménages et les sociétés pendant la crise.

 

Pour l’avenir, le récit ne pourrait pas être plus différent. Bien que le virus et les politiques fiscales et monétaires restent les principaux moteurs, aujourd’hui, les paramètres de ces deux éléments sont beaucoup plus sûrs et vont dans le même sens. Bien que l’économie reste nettement en dessous des niveaux pré-pandémiques, la dynamique de croissance, observée au cours du dernier semestre de 2020, pourrait permettre à 2021 d’afficher l’un des taux de croissance économique les plus rapides des économies développées depuis des décennies.

 

LE GRAND V

 

L’année 2020 était consacrée au virus; 2021 sera consacrée aux vaccins. Alors que nous nous attendons à quelques mois difficiles, le déploiement de vaccins efficaces a commencé. Bien que le déploiement ait connu des contretemps et des difficultés logistiques, nous avons bon espoir que ces problèmes seront résolus rapidement et qu’à l’approche du printemps et de l’été, une partie importante de la population sera vaccinée.

 

Alors que le nombre de cas commence à baisser, en raison du nombre élevé de congés, associé à l’inoculation des travailleurs de la santé et des personnes les plus vulnérables, nous nous attendons à un allégement significatif de la charge de travail actuelle qui menace de submerger les systèmes de soins de santé. Nous pensons que les chiffres commenceront à refléter cela en février et mars.

 

À mesure que la confiance se renforcera, les conditions préalables à la réouverture d’un plus grand nombre de segments de l’économie seront en place et la population commencera à se réengager dans un éventail de plus en plus large de services et d’activités de proximité. Bien que nous ne nous attendions pas à un signal clair, nous pensons que le processus de réouverture commencera au deuxième trimestre et continuera à se développer jusqu’au quatrième trimestre. En bref, en 2021, tout tourne autour du vaccin, et pour l’économie au moins, tout le reste est secondaire. (Alerte, comme nous le verrons plus loin, du point de vue de l’investissement, il existe un autre facteur clé).

 

L’ÉCONOMIE REFOULÉE ET LA POUSSÉE BUDGÉTAIRE PROCYCLIQUE

 

Avec le recul du virus et la réouverture de l’économie, nous voulons tous retrouver les activités, les voyages et les interactions sociales auxquels nous sommes habitués. Il existe un désir refoulé massif de s’engager dans de telles activités, mais, fait unique, par rapport aux récessions passées, cette année, il existe également une capacité significative de financer de telles activités. Les niveaux d’épargne des ménages sont en hausse et la reprise des marchés du logement et des actifs a considérablement augmenté le patrimoine net. Selon un calcul récent pour les États-Unis, l’épargne excédentaire des ménages par rapport aux tendances pré-COVID-19 s’élève à environ 1,4 billion $! Cela représente un grand pouvoir d’achat. Bien que cela soit en partie dû à l’incapacité de dépenser en période de confinement, cela reflète également le soutien fiscal sans précédent qui a permis aux revenus des ménages d’augmenter alors même que les revenus de l’emploi diminuaient, le gouvernement ayant présenté plusieurs mesures de relance et alloué des billions de dollars en transferts et en soutien accru au chômage.

 

Ce niveau d’économies exclut l’impact du dernier plan de 900 milliards $ adopté en décembre, et les 1 à 2 billions $ de relance supplémentaires attendus en 2021, lorsque les démocrates prendront le contrôle du Sénat. Le stimulus supplémentaire, qui pourrait atteindre 10 % du PIB américain, frappera une économie qui s’accélère déjà! Avec la réouverture de l’économie des services et le retour de la confiance, la volonté et la capacité de dépenser garantissent, à mon avis, que nous assisterons à un tsunami croissant de dépenses de consommation au cours de l’année à venir.

 

La croissance ne sera pas uniquement tirée par la consommation. Les entreprises ouvriront également les portes aux dépenses, d’abord sur la reconstitution des inventaires, puis sur les dépenses d’investissement et les fusions et acquisitions. Pour les entreprises, la combinaison d’une demande finale forte, d’une confiance croissante des PDG, d’une politique commerciale plus prévisible et plus professionnelle aux États-Unis et de taux d’intérêt au plus bas sera très puissante.

 

Alors que les États-Unis sont en tête, en termes d’échelle, et qu’ils doublent leurs efforts grâce à de solides économies et à un soutien budgétaire supplémentaire, nous pensons que la reprise induite par les vaccins et les politiques budgétaires de soutien dans le monde entier déclencheront une reprise synchronisée à l’échelle mondiale et les boucles de rétroaction positives qui y sont associées, alors que toutes les grandes économies mondiales s’accélèrent.

 

DES AMIS À LA FED

 

Toutefois, le soutien à l’économie ne s’arrête pas au vaccin et aux mesures fiscales, il y en a plus, et pour les marchés, cela est aussi important que le vaccin. Normalement, avec l’élan économique qui s’annonce, on s’attendrait à ce que la Réserve fédérale américaine (la Fed) et d’autres banques centrales commencent à resserrer leur politique monétaire - ce qui éliminerait le « bol de punch » au moment où la fête commence à battre son plein. Pour dire les choses simplement, cela n’arrivera pas! La Fed s’est engagée à maintenir les taux d’intérêt à ZÉRO, probablement jusqu’en 2023/2024, et maintiendra le rythme actuel d’assouplissement quantitatif des achats à 120 milliards$ par mois, jusqu’en 2021. AU JEU!

 

La Fed a fondamentalement changé son cadre de politique monétaire comme l’a souligné le président de la Fed, Jay Powell, le 27 août 2020, dans son discours à Jackson Hole. Il vaut la peine de revenir sur ce discours. En effet, la Fed y a abandonné son mantra de lutte contre l’inflation des 40 dernières années, introduit par Paul Volker pour combattre l’inflation dans les années 1970. Aujourd’hui, la Fed mène un combat acharné pour vaincre la déflation. Elle se bat pour générer, et non pas pour battre, l’inflation. Avec des taux d’intérêt à la limite inférieure de zéro et une inflation constamment inférieure à l’objectif, la Réserve fédérale américaine s’inquiète du risque de japonisation mondiale, les économies s’enlisant dans une stagnation désinflationniste subtile, comme on le voit au Japon depuis les années 1990. Nous pensons que la Fed considère cela comme un risque structurel à long terme ayant des implications négatives importantes et qu’elle est donc prête à laisser l’inflation cyclique à court terme s’échauffer pour tenter de réancrer la dynamique inflationniste à long terme. En bref, la Fed sait comment lutter contre l’inflation, mais pas contre la déflation. Si le cadre actuel de ciblage de l’inflation moyenne libère le dragon inflationniste supérieur, et bien parfait! Nous savons comment gérer les dragons. Mais le risque réel est que les marchés mondiaux développés glissent constamment vers des modèles désinflationnistes. Nous n’avons pas vu de Dragons depuis plus de trente ans!

 

THÉORIE DU PORTEFEUILLE MODERNE : RIP

 

Le changement de la Fed est un changement absolument crucial de la politique monétaire avec des implications massives du point de vue de l’investissement. Comme je l’ai écrit en 2019, dans un avenir prévisible, nous allons vivre avec des taux d’intérêt réels négatifs. En d’autres termes, nous pensons que les actifs dits sûrs, que les investisseurs peu enclins au risque utilisent pour générer des revenus (espèces, obligations d’État, CPG, etc.), ne généreront pas de taux de rendement positifs supérieurs au niveau d’inflation attendu. Avec le taux de rendement réel actuel sur dix ans aux États-Unis à environ -1 %, les investisseurs bloquent en fait des pertes de 1 % par an pendant dix ans en prêtant de l’argent au gouvernement américain. Ce n’est pas ma définition du sans-risque! Une nouvelle réflexion est nécessaire.

 

L’un des principaux résultats de l’engagement des banques centrales à appliquer des taux d’intérêt nuls est que les faibles taux font grimper la valeur des autres actifs. À mesure que la confiance dans les perspectives économiques s’améliore, elle peut pousser davantage d’investisseurs vers des actifs plus risqués dans le but d’obtenir un rendement réel positif ou un rendement global. Je dirais que l’argent presque gratuit, associé à une confiance croissante, sont les deux ingrédients clés qui alimentent les bulles du marché des actifs. En outre, je rappelle aux investisseurs que les bulles peuvent être amusantes pendant la période de gonflement, mais que les éclatements peuvent vraiment faire mal.

 

Le contexte des investissements dans les années à venir, avec des taux proches de zéro, sera particulièrement difficile à gérer. Il est probable que des rendements raisonnables seront possibles, mais leur réalisation nécessitera une approche active de la navigation sur les marchés et une volonté d’accepter et de gérer la volatilité à court terme, car le prix à payer pour obtenir un rendement à long terme supérieur au taux.

 

RISQUES

 

ÉCHEC DE LA COVID-19

 

Il est clair que nous avons des perspectives économiques très positives pour 2021 tant que le déploiement de vaccins efficaces se poursuit.  Le plus grand risque à nos yeux serait ce que nous appelons un échec de la COVID-19. Une forme de surprise négative de la COVID-19, telle qu’un retard prolongé dans le déploiement du vaccin, un manque d’efficacité durable ou l’apparition de nouvelles souches résistantes. Pour de nombreuses raisons, nous pensons que ces événements sont peu probables, mais ils auraient un impact considérable et nous continuons à suivre la situation de très près, sous la direction du chef de notre équipe de soins de santé, le Dr Jeff Elliott.

 

DES PRIX DÉJÀ AJUSTÉS

 

Un deuxième risque, ou défi pour les investisseurs, consiste à savoir dans quelle mesure ce scénario se reflète déjà dans des marchés d’actions qui ont atteint des sommets historiques. Notre point de vue n’est pas unique et est assez proche du consensus. Toutefois, je pense que l’ampleur de la reprise et la croissance des bénéfices qui en découlera surprendront à la hausse. C’est précisément lorsque les cycles tournent que les estimations ont tendance à manquer l’ampleur de la reprise. Ainsi, bien que les cours des actions soient aujourd’hui élevés, sur la base des bénéfices actuels, une croissance plus forte que prévu permettra aux sociétés d’accroître leur valorisation. En termes généraux, on pourrait imaginer une augmentation des revenus de 25 %, par rapport aux niveaux touchés par la pandémie de l’année dernière, et une hausse des marchés de 10 %. En bref, les marchés pourraient terminer l’année à un niveau plus élevé et moins cher qu’au début.

 

Une reprise économique généralisée élargit également l’éventail des industries et des sociétés qui bénéficieront et élargit les facteurs de performance des actions de quelques secteurs et industries, tels que les technologies de l’information et le commerce électronique, qui ont gagné au cours de la pandémie, pour inclure les secteurs plus cycliques tels que les produits de consommation discrétionnaire, les produits industriels, les matériaux et l’énergie. Cet élargissement pourrait permettre aux marchés globaux d’augmenter à mesure que les secteurs en retard rattrapent leur retard, une tendance qui s’est amorcée ces derniers mois et qui est le signe de marchés plus sains.

 

NOTRE POSITION

 

Au sein de nos fonds principaux, tels que le Fonds mondial de croissance et de revenu Signature, nous avons augmenté notre exposition aux actions (objectif : jusqu’à 66 %) depuis octobre, en partie en nous tournant vers les secteurs plus cycliques comme mentionné ci-dessus. Nous restons surpondérés dans le secteur financier, car nous constatons que la courbe des rendements est plus raide en raison de la reprise économique, même si la partie courte est ancrée à zéro, ce qui constitue un contexte positif pour le secteur financier. Avec des taux réels en territoire négatif, nous maintenons une sous-pondération importante dans les obligations gouvernementales, près de 20 %, dont environ la moitié est allouée au crédit de qualité supérieure où le rendement, bien que faible, est toujours meilleur que celui des obligations gouvernementales. En bref, nous continuons à prendre des risques et à privilégier les valeurs cycliques au sein des actions.

 

APRÈS LA REPRISE : LA FÊTE DES ANNÉES FOLLES OU LA GUEULE DE BOIS DE LA DÉCENNIE PERDUE?

 

À l’approche de 2021, nos discussions se tournent vers ce qui vient ensuite? En d’autres termes, en 2021, tout est question de reprise cyclique, un choix facile, mais qu’y a-t-il au-delà de la reprise? Sommes-nous en train d’évoluer vers une trajectoire de croissance structurellement plus élevée par rapport à celle de la dernière décennie, renforcée par un nouveau cadre de politique économique guidé par un nouveau paradigme fiscal et monétaire? Ou alors, on se rabat sur la trajectoire désinflationniste lente de la stagnation séculaire influencée par les trois D : Dette, démographie et dérèglement numérique? Ce sont là des questions importantes qui ont de vastes implications en matière d’investissement et de positionnement. Ils ne sont peut-être pas importants pour aujourd’hui, mais ils le seront pour 2022, et les marchés regardent toujours vers l’avenir. Aujourd’hui, je penche pour un résultat en trois D plus lent, mais cela comporte également des risques importants pour les économies, la politique, avec des implications pour l’inégalité et les sociétés. Le résultat dépendra fortement de l’économie politique et des choix politiques faits par les différents pays. Rien n’est coulé dans le béton. Ce qui est certain, c’est que nous restons dans une ère de changements structurels accélérés dans les entreprises, les économies, la géopolitique et nos sociétés. Il sera essentiel de rester informé pour gérer ce qui devrait être une décennie tumultueuse. 2020, a été le premier acte d’une décennie qui, selon toutes les indications, pourrait être l’une des plus tumultueuses du siècle.

 

Drummond Brodeur
Janvier 2021

 

Source : Bloomberg Finance L.P. et Gestion mondiale d’actifs CI en date du 11 au 15 janvier 2021.

 

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À propos de l’auteur

Drummond Brodeur


Drummond Brodeur, MBA, CFA

Vice-Président principal, co-chef de la macro-économie et gestion des devises
Gestion mondiale d’actifs CI

Drummond Brodeur travaille dans le secteur des investissements depuis 1989 et a rejoint Gestion mondiale d’actifs CI en 2007. Il possède une solide expérience axée sur la Chine et le bassin Pacifique. Avant de rejoindre CI, M. Drummond a notamment supervisé des portefeuilles internationaux chez KBSH Capital Management, été analyste principal chez Caisse de Depot et gestionnaire de portefeuille chez Bankers Trust Australia. Drummond est titulaire d’un baccalauréat de l’Université Western Ontario et de deux maîtrises de l’Université Monash de Melbourne, en Australie. Il a également obtenu le titre d’analyste financier agréé.

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Publié le 26 janvier 2021.