20 février 2020
En 2018, le gouvernement fédéral a adopté une législation qui modifiait la façon d’imposer les sociétés privées. Après avoir entendu les commentaires formulés par de nombreux fiscalistes, les modifications ont été mises en place et viennent réduire la déduction accordée aux petites entreprises (« DPE ») qui est offerte aux sociétés privées sous contrôle canadien (« SPCC »). La politique motivant cette décision était un manque d’équité perçu dans le cadre du système fiscal canadien. La croyance est que de permettre à une société privée d’utiliser des dollars après impôt, gagnés à un faible taux pour petites entreprises, pour investir dans des placements passifs afin d’y tirer un revenu, était injuste. Plutôt que d’avoir recours à l’imposition du revenu de placement à un taux plus élevé et de perturber les taux d’imposition intégrés sur lequel le système fiscal du Canada repose, le gouvernement a choisi de récupérer la DPE pour certains groupes de sociétés associés.
L’idée de recouvrement n’est pas nouvelle. Les entreprises qui ont un capital imposable supérieur à 15 millions $ ne bénéficient pas du taux d’imposition préférentiel faible sur le revenu d’entreprise actif. Dans l’ensemble, le capital imposable est composé de bénéfices non répartis plus les passifs non commerciaux, moins les prêts et avec des placements dans des entreprises canadiennes. Il semble que la politique derrière cette décision est que les entreprises ayant des bénéfices non répartis substantiels ou certains passifs, ou les deux, ne sont pas jugées comme étant « petites », par conséquent elles ne devraient pas bénéficier de la DPE. Les autres règles de recouvrement présentent un nouveau terme, Revenu de placement total ajusté (« RPTA »). Cette deuxième règle de recouvrement commencerait à réduire l’accès à la DPE lorsque le RPTA de l’année fiscale précédente se chiffrait à 50 000 $. L’accès serait entièrement éliminé lorsque le RPTA atteint 150 000 $. La règle initiale de recouvrement ciblait les « grandes entreprises », réduisant la DPE lorsque le capital imposable était supérieur à 10 millions $ et l’éliminait entièrement lorsque le montant atteignait 15 millions $. Puisque la DPE sera réduite lorsque les actifs investis représentent aussi peu que 1 000 000 $, présumant un rendement modeste de 5 %, la politique derrière la nouvelle règle ne cible pas nécessairement les grandes entreprises seulement. Avec ces nouvelles règles, il sera important pour les propriétaires de petites entreprises de bien comprendre le RPTA afin qu’ils puissent continuer de bénéficier du faible taux d’imposition permis par la DPE.
Donc, de quelle façon le RPTA est-il calculé et comment un propriétaire de petite entreprise peut-il tenter de le gérer pour que son entreprise puisse toujours bénéficier de la DPE? Le point de départ pour calculer le RPTA est le revenu de placement total (RPT), comme défini dans la Loi de l’impôt sur le revenu (la « L.I.R. »). En général, le RPT d’une entreprise se compose des éléments suivants :
• Intérêts
• Gains en capital imposables, nets de pertes en capital déductibles de l’année courante ou d’années antérieures
• Revenu de location hors exploitation
• Revenu étranger hors exploitation, y compris le revenu étranger accumulé, tiré de biens (« REATB »)
• Pertes qui se rapportent à un bien
Lorsqu’on calcule le RPTA, les sources de revenu suivantes ne sont pas incluses:
• Dividendes de sociétés liées (notez par contre que les dividendes de sociétés non liées sont inclus dans le RPTA)
• Gains en capital imposables d’éléments d’actif commercial, y compris les gains sur les actions qui sont des actions admissibles de petite entreprise
De plus, les déductions suivantes ne peuvent servir à réduire le RPTA:
• Pertes en capital nettes d’années précédentes ou subséquentes
• Déductions pour don de bienfaisance
• Déductions pour impôt étranger accumulé
Dividendes de sociétés liées
Lorsqu’un actionnaire de corporation détient plus de 10 % des votes et de la valeur de toute catégorie d’action d’une société, cette société est liée. Les dividendes de sociétés liées ne sont pas inclus dans le calcul de la RPTA, par conséquent, ils n’ont aucune incidence sur la disponibilité de la DPE pour le groupe d’entreprises associées. Ce qui s’accorde parfaitement d’un point de vue de la politique puisqu’il est courant pour une entreprise en exploitation de verser un dividende à sa société de portefeuille pour la protection des créanciers et autres motifs. Depuis que le RPTA est calculé comme total de toutes les entreprises associées, il serait injuste d’inclure ces dividendes dans ce calcul puisqu’ils représentent un revenu provenant d’un investissement dans un élément d’actif productif de revenu (c.-à-d. société en exploitation), comparativement à un actif hors exploitation, comme des actions cotées.
Gain sur la vente d’éléments d’actif dans une entreprise exploitée activement
Les gains en capital imposables provenant de la vente d’actifs qui ont été utilisés dans une entreprise exploitée activement sont également exclus du RPTA. Tout comme la politique visant à exclure les dividendes de société liée, l’exclusion des gains provenant d’actifs de l’entreprise démontre que le gouvernement souhaite quand même encourager l’investissement dans les petites entreprises. Le remplacement d’actifs et la vente d’anciens actifs peuvent représenter un aspect important lié à l’exploitation d’une petite entreprise. De plus, certains propriétaires d’entreprise peuvent vendre leurs actifs d’entreprise dans le cadre d’une stratégie de planification de sortie. Le gouvernement ne souhaite pas pénaliser les sociétés privées lorsqu’elles se départissent de leurs actifs, et a donc autorisé cette exclusion.
Pertes nettes en capital d’années antérieures
Sur une base annuelle, les contribuables, y compris les sociétés, doivent calculer leur revenu net aux fins fiscales (« revenu net »). Certaines inclusions et déductions sont définies dans la Loi pour savoir comment calculer le revenu net. Cependant, l’obligation fiscale d’un contribuable n’est pas calculée selon le revenu net, mais plutôt selon son revenu imposable. Certaines déductions sont autorisées dans le calcul du revenu imposable, conformément à la Section C de la L.I.R. Cependant, lors du calcul du RPTA, certaines de ces déductions ne sont pas permises, dont les pertes nettes en capital d’années antérieures. Les pertes nettes en capital peuvent être appliquées sur les trois années antérieures ou reportées indéfiniment afin de réduire des gains nets en capital de l’année dans laquelle s’appliquent. Bien que cette option peut toujours servir pour réduire les gains en capital imposables de l’année courante d’une société privée, seules les pertes nettes en capital de l’année courante peuvent servir à réduire le RPTA. Par conséquent, les propriétaires de petites entreprises qui désirent toujours bénéficier de la DPE devront gérer les gains et les pertes en capital pour s’assurer qu’ils sont réalisés dans la même année fiscale.
Dons
Comme indiqué précédemment, le RPT (c.-à-d. le point de départ pour le RPTA) inclut différents éléments; cependant, les déductions pour dons ne font pas partie de ceux-là. Une déduction pour pertes liées à un bien est permise dans le calcul du RPT. Une perte liée à un bien survient lorsque les dépenses engagées pour tirer un revenu de ce bien excèdent le revenu gagné. Un don de bienfaisance n’est pas considéré comme une dépense engagée aux fins de tirer un revenu, mais plutôt un acte de charité pour lequel les sociétés peuvent obtenir une déduction distincte dans le calcul du revenu imposable.
Impôt étranger accumulé (« IEA »)
Il existe aussi une exclusion dans la définition du RPTA concernant l’IEA payé sur le revenu étranger accumulé, tiré de biens (« REATB »). Même si le REATB est un sujet complexe et peu connu de la moyenne des petites entreprises, avec la mondialisation des marchés et la proximité du Canada avec les États-Unis, il n’est pas si rare de le constater dans un contexte de société privée. En général, lorsqu’un contribuable canadien (y compris une société privée canadienne) détient une société étrangère, laquelle est une société étrangère affiliée contrôlée (SEAC), et que la SEAC tire du revenu hors exploitation, l’actionnaire canadien pourrait devoir inclure le revenu (c.-à-d. le REATB de cette SEAC même s’il ne reçoit pas de dividendes pendant l’année. En outre, l’actionnaire canadien a le droit à une déduction en fonction du montant IEA payé par la SEAC. Il arrive souvent qu’en raison de la façon dont la déduction de l’IEA est calculée, l’inclusion REATB soit moindre que la déduction de l’IEA, donc l’actionnaire canadien a peu ou pas de revenu imposable lié à son investissement dans la SEAC. Cependant, dans le calcul du RPTA, les nouvelles règles ne permettent pas la déduction de l’IEA, donc le montant total du REATB est inclus dans le RPTA.
Bien que le concept de revenu ou de perte peut sembler simple d’un point de vue commercial ou comptable, la définition d’un RPTA est beaucoup plus complexe. Une analyse judicieuse et complète de cette définition est un point de départ pour protéger l’accès d’une société à la DPE sur une base annuelle. Il vaut toujours mieux consulter un fiscaliste, particulièrement en cas de doute.
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